La kinésithérapie respiratoire et la réadaptation à l’effort peuvent atténuer la dyspnée, fatigue et désentraînement chez les personnes avec covid long, à condition d’un bilan précis et d’une progression sécurisée.
La prise en charge associe bilan kinésithérapique, rééducation ventilatoire (contrôle respiratoire, correction de l’hyperventilation), réentraînement aérobie/renforcement à intensité adaptée (prudence en cas d’intolérance à l’effort/PEM), éducation et autogestion des symptômes. Objectifs : diminuer la dyspnée et fatigue, améliorer la capacité d’effort et qualité de vie, sans majorer les symptômes.
Ce que disent les recommandations récentes
- HAS (2024) : parcours coordonné, évaluation des risques (dysautonomie, troubles ventilatoires,
malaise post-effort ou PEM), rééducation et réadaptation individualisées avec progressivité et suivi. - OMS/WHO (2023–2024) : accès précoce à la réadaptation, modèles hybrides (présentiel/téléréhab), objectifs fonctionnels centrés patient.
- NICE (mise à jour continue) : prise en charge multidisciplinaire, réhabilitation graduée, soutien à l’autogestion.
Bilan kinésithérapique : poser un cap et sécuriser
Avant d’entraîner, on évalue : dyspnée (mMRC), intensité de fatigue (échelles validées), capacité d’effort (6MWT/1MSTS si approprié), patrons ventilatoires (respiration thoracique haute, dysfonction du contrôle respiratoire), signes d’intolérance à l’effort/PEM et comorbidités. Les mémos Ameli détaillent les axes clés (fatigue, dyspnée/hyperventilation, douleurs).
Drapeaux rouges (orientation médicale) : désaturation à l’effort, douleur thoracique aiguë, tachycardie marquée, syncope, suspicion embolique/myocardite.
Rééducation ventilatoire : calmer l’hyperventilation, optimiser le souffle
- Contrôle respiratoire : ralentissement ventilatoire, diaphragmatique, expiration prolongée ; réentraînement du pattern avec biofeedback simple (mains, tempos).
- Exposition graduée aux activités avec focus sur nasal breathing et économie ventilatoire.
- Spécifique hyperventilation : éducation aux déclencheurs, techniques de récupération, rééducation en conditions variées.
Ces leviers sont soutenus par l’Ordre et Ameli pour le covid long.
Réadaptation à l’effort : oui, mais « low & slow »
La réadaptation améliore la tolérance à l’effort, la dyspnée et la qualité de vie dans le covid long/PCC, selon Cochrane 2024 et plusieurs méta-analyses récentes. Les effets sont cliniquement pertinents quand le programme est individualisé, progressif et monitoré.
Paramètres pratiques (cadre sécuritaire)
- Démarrage bas, progression lente (paliers de 10–15 % max/semaine), jours « on/off ».
- Auto-pacing si PEM : fractionner, prioriser, planifier ; adapter intensité sous seuil symptomatique.
- Combiner cardio aérobie (marche/ vélo), renforcement (multisegments, charges légères → modérées), souplesse.
- Surveillance : RPE/Borg, FC, SpO₂ si disponible, journal des symptômes; arrêt si exacerbation. Recommandations pratiques alignées OMS et consensus 2024 sur l’exercice selon présence de PEM.
Preuves récentes
- Cochrane 2024 : la réhabilitation respiratoire multidimensionnelle bénéficie dyspnée et capacité d’exercice chez adultes covid long/PCC. Certitude faible à modérée selon domaines.
- Méta-analyses 2024–2025 : amélioration VO₂ pico/6MWT, fatigue et QoL ; la durée 4–8 semaines vs >8 : différence non significative, l’essentiel est l’individualisation et l’adhérence.
- Vidal (2024) : cadre de prescription sécurisée, intérêt de la réadaptation pour la fatigue.
Exemples d’exercices (à adapter après bilan)
Respiration contrôlée (5–10 min, 2–3×/j) : inspiration nasale 3–4 s, expiration 4–6 s, repos 2 s ; posture assise/decubitus.
Marche fractionnée (10–20 min) : 1–2 min marche / 1–2 min repos, 3–5 cycles ; augmenter par paliers.
Renforcement doux : assis-debout, tirage élastique, presse murale — 1–2 séries de 8–10 reps, J1/J3/J5.
Récupération : positions anti-dyspnée, cohérence ventilatoire 2–3 min post-effort.
(Adaptation stricte en cas de PEM/dysautonomie.)
Éducation & autogestion : reprendre la main sans surmenage
- Pacing/Planification : alterner charges cognitives/physiques, éviter le « boom-and-bust ».
- Sommeil, hydratation, nutrition de soutien, respiration nasale dans les AVQ.
- Téléréhabilitation : utile pour le suivi et l’adhérence quand elle est bien structurée. OMS recommande les modèles hybrides.
Suivi, critères de progression et réorientation
- Progression si dyspnée/fatigue stables ≤24–48 h après séances, RPE 3–4/10, 6MWT ou tests fonctionnels en hausse.
- Réévaluation toutes 4–6 semaines, coordination avec médecin traitant.
- Réorientation si aggravation persistante des symptômes, nouvelles douleurs thoraciques, désaturation, malaises.
FAQ
La kinésithérapie respiratoire est-elle prouvée dans le covid long ?
Les revues (Cochrane 2024, méta-analyses 2024–2025) montrent des améliorations de la dyspnée, de la capacité d’effort et de la qualité de vie, avec certitude faible à modérée.
Combien de temps dure un programme efficace ?
Les effets ne semblent pas dépendre fortement d’une durée 4–8 semaines vs >8 semaines ; l’individualisation prime.
Que faire si j’ai une intolérance à l’effort/PEM ?
Prioriser pacing, fractionnement, seuils très bas, récupération prolongée ; la progression reste possible mais plus lente.
La téléréhab’ fonctionne-t-elle ?
Oui, en modèle hybride, avec objectifs clairs et monitorage — recommandée par l’OMS.
Conclusion
La kinésithérapie respiratoire et la réadaptation à l’effort sont des piliers de la prise en charge du covid long pour retrouver du souffle et de l’autonomie, à condition d’un bilan structuré, d’une progression douce, et d’une coordination avec le médecin. Les preuves récentes sont encourageantes, mais appellent à rester prudents et individualisés, notamment en cas de PEM.
Important — Informations à visée éducative, ne remplacent pas un avis médical. En cas de question personnelle, consultez un·e professionnel·le de santé.
Sources
- HAS. Parcours de soins de l’adulte avec des symptômes prolongés de la Covid-19 (2024). (Haute Autorité de Santé)
- WHO. Clinical management – Rehabilitation of adults with post COVID-19 condition (Living guideline, 2023–2024). (Organisation mondiale de la santé)
- Cochrane Review (2024). Rehabilitation and COVID-19. (PMC)
- Li S. et al. (2025). Effect of pulmonary rehabilitation for patients with long COVID-19 (revue systématique/meta-analyse). (PMC)
- Martínez-Pozas O. et al. (2024). Pulmonary rehabilitation effect on long COVID. Physiotherapy Research International. (Wiley Online Library)
- Gloeckl R. et al. (2024). Practical Recommendations for Exercise Training in Long COVID. Frontiers in Physiology. (PMC)
- Ameli (2025). Covid long — diagnostic et prise en charge par le masseur-kinésithérapeute. (Ameli)
- VIDAL (2024). Covid long : réadaptation à l’effort en sécurité. (VIDAL)
- NICE NG188 (mise à jour continue). Long-term effects of COVID-19. (NICE)
- Image par Juraj Varga
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Alejandro Rojas
Masseur-kinésithérapeuteFondateur du média Première Santé, Alejandro Rojas est masseur-kinésithérapeute diplômé depuis 2005, spécialisé en kinésithérapie respiratoire. Il a exercé en soins intensifs, en pneumologie, en cabinet libéral, et travaille aujourd’hui dans un service de soins palliatifs.
